Du 1er au 5 septembre, l’artiste folk Prokop débarque à Django pour une résidence de création. Il s’agira de transposer son dernier album sur scène pour préparer au mieux la tournée qui s’annonce. Nous l’avions déjà reçu le 15 novembre 2018 en première partie de la légende Otis Taylor, puis en novembre dernier à l’occasion de l’une de nos « tournées des récrés ». Dans l’intervalle, il a multiplié les dates, il s’est entouré, il s’est développé. Sa musique aussi a pris des contours variés, se laissant volontiers emporter vers le rock, le jazz, la chanson. Nous voulions revenu avec lui sur cet itinéraire original, qui se précise chaque jour un peu plus. C’est chose faite !
Parle-nous de ton projet. Comment a-t-il vu le jour ? Comment évolue-t-il ? C’est toujours compliqué pour un artiste solo de répondre à cette question. Comment il a vu le jour ?
Avec ma naissance je suppose... Mais vous me direz qu’on n’a pas ses racines où on est né. Tout le monde sait ça ! Disons alors que depuis mon arrivée en France depuis l’Angleterre il y a quelques années, il s’est imposé comme mon projet principal. J’ai rapporté des pubs de Hull ce qui me semble faire le folk là-bas : on a une chanson et on la joue sans fioriture, avec les gens qui se trouvent autour de la table à ce moment donné... Ce qui compte, c’est le discours de la chanson et de la situation. A force de jouer les mêmes chansons, on en écrit d’autres, on rencontre des musiciens qui comprennent votre discours, on signe chez Deaf Rock Records et on sort un triple-album folk. C’est comme ça que ça se fait en 2020 ! Si la crise actuelle le permet en tout cas...
Bob Dylan, Sonny Boy Williamson ou encore The Pogues, ce sont des noms qui te parlent, qui ont compté pour toi ? Tu écoutes encore beaucoup de musique aujourd’hui ?
Enormément oui. J’écris et je compose parce que ça m’a toujours semblé plus simple que de jouer des traditionnelles ou des reprises. Mais un musicien – folk tout particulièrement, ne fait qu’entretenir (et peut-être allonger un poil) un chemin que d’autres avant lui ont tracé. Il faut écouter ce qui s’est fait et se fait pour pouvoir le trouver ce chemin mais aussi pour éviter de le faire tourner en rond. C’est sans doute ce que dit Murders most Foul : les réponses que l’on cherche ne se trouvent pas dans les chansons qu’on écrit. Alors on pose Bob Dylan, Tom Waits, Sonny Boy Williamson, les Pogues, les Cramps, Riley Baugus, Vladimir Vissotsky, Karel Kryl, Micah P. Hinson, Vinicio Capossela, Ian Noe et d’autres sur la platine et on voit ce qui en sort... C’est le principe de ma Love Letter par exemple : elle n’existerait évidemment pas sans Ewan MacColl et Eric Bogle.
Le temps de la création est toujours particulier. L’écriture des textes, la composition, l’affirmation d’un style. Est-ce un plaisir à chaque nouvel album ?
Pour le moment oui. J’espère. Tout n’y est pas un plaisir évidement mais si travailler sur un nouvel album n’est pas un plaisir, ne le faîte pas... Pour Love Letters from Across the Street, un plaisir, ça l’a été ! Notamment grâce aux gens avec qui j’ai eu la chance de travailler : les sept autres musiciens évidemment qui participent à la couleur du disque, le réalisateur sans aucun doute à qui je dois énormément et aussi la maison de disque qui m’a laissé toute la liberté que j’espérais. Je pense que ça se ressent dans le disque.
Que vas-tu travailler plus particulièrement sur scène à Django ? Ton prochain spectacle dans sa globalité ? Différentes formules qui pourraient être proposées ?
Le concert. J’ai les chansons, les enregistrements, maintenant il faut adapter la liberté du studio aux contraintes du live. Bien que l’album ait été entièrement enregistré live, il va falloir adapter les chansons à la sonorisation, au matériel de tournée, et aux différentes formations (solo ou en groupe)... On ne risque pas de s’ennuyer !
Et cette tournée, comment s’organise-t-elle ? La crise du coronavirus n’a-t-elle pas trop compliqué la recherche de dates ?
La crise du coronavirus a terriblement compliqué les choses. A l’heure qu’il est, tous les concerts sont annulés ou reportés, les tournées aussi, il n’y a aucun moyen de se projeter ou de s’organiser. Les salles de concerts sont fermées mais les programmations se remplissent déjà pour 2021-2022... Ce qui est extrêmement problématique. Aujourd’hui, on pense sans doute être obligé de repousser la sortie de l’album parce que sortir un triple sans tournée derrière, ce serait du suicide...
Nous avons collaboré ensemble déjà à plusieurs endroits, qu’il s’agisse de programmation, d’action culturelle ou d’accompagnement. Quel regard portes-tu sur notre projet ?
Un regard d’admiration, évidemment ! Mener comme vous le faites un projet d’une telle ampleur, artistique et sociale, ne peut provoquer d’autre regard que celui-là... A part peut- être la jalousie ?!
Un souvenir spécial à nos côtés ?
Plusieurs ! Le dernier en date : la participation aux récréations artistiques. C’était absolument incroyable, pour le plaisir qu’il procure autant aux enfants qu’au musicien. Ces récréations confèrent un rôle à l’artiste ; rôle qu’il devrait toujours avoir je pense. Je ne pensais pas que ce serait si fort. Un autre, dans la même semaine, en tant que spectateur cette fois : le concert de Blick Bassy. Extraordinaire. Mais – c’est un peu facile me direz-vous, je suis obligé de parler du partage de l’affiche avec Otis Taylor (un de mes héros) en novembre 2018...