DE L’ART DE SAVOIR COORDONNER...

16.03.2020

Les coordinateurs REP et REP + (Réseau d’Éducation Prioritaire), ce sont un peu les garde-fous d’une drôle de zone tampon, entre les nombreuses écoles d’un territoire, de la maternelle au collège, ses enseignants, ses élèves, les projets menés tous azimuts et les partenaires de ce même territoire dont nous faisons partie. Depuis notre arrivée au Neuhof, ils nous ont accompagnés et prodigués des conseils précieux, dans la connaissance du terrain, ses réalités, ses enjeux, ses défis. Une aide essentielle sur laquelle nous nous appuyons, comme tant d’autres, pour s’adresser aux plus jeunes et à leurs familles. Trop souvent chevilles ouvrières de l’ombre, il nous paraissait important de les mettre en lumière. Rencontre avec Joëlle Guth, coordinatrice du réseau Stockfeld et Wafaa Kadachi, coordinatrice du réseau Solignac.

Pouvez-vous nous présenter votre métier, vos missions, en quelques mots. De quelle façon votre action s’inscrit-elle dans le territoire ?
Les coordinateurs de « réseau » étaient historiquement des coordinateurs de « zones » d’éducation prioritaires. Dans un premier temps, leur action se dirigeait essentiellement vers les établissements scolaires de la zone géographique définie pour créer des liens entre eux. Passer du zonage à la notion de réseau n’est pas anodin. Le travail des coordinateurs dépassait alors l’Éducation Nationale pour s’ouvrir plus largement à tous les partenaires de l’École qu’ils soient institutionnels, associatifs et bien évidemment aux parents d’élèves.

Le réseau éducatif est très actif au Neuhof, en particulier au sujet de la parentalité. À quel point cet engagement peut-il faciliter ou amorcer des changements de pratique ?
L’enfant n’apprend pas qu’à l’école. Tout pour lui est occasion d’apprendre, prétexte à s’exercer, à s’enrichir de connaissances et d’expériences nouvelles, qui lui permettent de se construire et de grandir. Il s’inscrit dans sa famille, dans son quartier où il va à l’école. Partager des valeurs communes avec les associations du quartier qui œuvrent, comme l’École, auprès des familles, est primordial. Le but est le même, celui de l’épanouissement de l’enfant qui passe aussi par sa réussite scolaire. Travailler ensemble nous permet de décliner la mise en œuvre de cet objectif commun, chacun de sa place, avec ses compétences lors de projets, internes à chacune des structures et aussi lors de projets communs.

Vous êtes particulièrement attentives à la liaison CM2/6e, avec ce passage souvent délicat au collège. Pour quelles raisons ?
Dans les sociétés primitives, des rites de passage accompagnent l’enfant dans son accession progressive au monde adulte. Dans nos sociétés modernes, l’accession à la majorité est plus tardive et pourtant la nécessité de concrétiser des étapes vers l’âge adulte est toujours aussi importante. Le parcours scolaire permet aujourd’hui de marquer ces étapes : entrer à l’École ; passer à la « grande école » pour apprendre à lire, écrire et calculer ; aller au collège ; choisir la voie de l’apprentissage ou passer son baccalauréat. La liaison CM2/6ème s’inscrit dans ce parcours, tout comme la première scolarisation, la liaison GS/CP et l’orientation. Accompagner ces transitions est nécessaire pour que RUPTURE rime avec GRANDIR et ne soit pas source d’angoisse et synonyme d’écueil.

Vous souvenez-vous des premiers contacts noués avec la salle et l’équipe, vos attentes, vos doutes... ? Les choses ont-elles évolué au fil des saisons ?
Au début, il n’y avait rien. Puis s’est construite la salle. Concertation et votation ont été lancées sur le quartier pour en choisir le nom. C’est avec l’arrivée de l’équipe actuelle de Django (début 2016) que la salle s’est réellement ouverte sur le quartier, avec une volonté affirmée que les habitants du Neuhof s’emparent de ce lieu qui était là pour eux. Parmi les premiers contacts, il y eut ce jour où tous les partenaires ont été réunis par l’équipe de Django pour réfléchir ensemble à promouvoir les CinéDjango. Les idées ont fusé, ont été mises œuvre et maintenant il faut être parmi les premiers arrivés pour obtenir une place dans la salle ! Quelle victoire ! Il n’y a plus de place pour le doute aujourd’hui.

Vous nous épaulez depuis le début, grâce à votre expérience dans le champ de l’éducation, pour relier l’art et l’école. Quel regard portez-vous sur les initiatives conduites ensemble ?
L’Art est entré dans les écoles grâce à de beaux projets culturels : les récréations artistiques, la réalisation de fresques, le projet de concert participatif en partenariat avec l’OPS, les interventions dans les classes des étudiants du CFMI... Les écoles prennent le chemin de Django pour participer aux spectacles jeune public mais également découvrir les coulisses de la salle, échanger avec des artistes, découvrir des métiers... Cette énumération, qui n’est pas exhaustive, montre combien une porosité s’est établie entre les établissements scolaires et le monde artistique et culturel, dont les contacts sont favorisés par l’Espace Django, véritable ressource culturelle du quartier. Toutes ces initiatives, conduites en partenariat, ont été construites dans la concertation, dans l’écoute mutuelle et le professionnalisme de chacun.

Plus largement, quelle place se doit d’occuper selon vous un projet comme Django au sein du réseau éducatif du Neuhof ?
Plus que la place que Django se doit d’occuper au sein du réseau éducatif du Neuhof, c’est plutôt l’esprit avec lequel il l’occupe qui nous semble important. En effet, la volonté de construire ensemble, dans l’écoute et le respect de chacun, permettra toujours à l’Espace Django de rester au cœur de la cité, quels que soient l’actualité, les contraintes et besoins du moment, les financements... qui pourront dicter les évolutions à venir. C’est avec confiance que nous envisageons l’avenir.