L’Espace Django accueille toute l’année des artistes de tous horizons pour une programmation sans frontières. Des contrées les plus lointaines aux artistes de notre territoire, les rencontres sont d’une incroyable richesse que nous souhaitons nourrir en développant les créations Django ! Pour cette première, nous travaillons avec la structure strasbourgeoise Machette Production pour un projet ambitieux et inédit : Les Frères Timal ! Né de la rencontre de l’artiste local Leopard DaVinci et de l’ambianceur percussionniste emblématique de la Guadeloupe, Jean-Marc Ferdinand. La création se tiendra dans nos murs en septembre lors d’une semaine de résidence avec une première en live pour l’ouverture de saison le 17 septembre !
Les deux protagonistes nous en disent plus sur ce projet fou qui se réalise enfin.
Tout d’abord, qu’est ce qui a provoqué votre rencontre, humainement et artistiquement ?
Léopard DaVinci : Pendant le covid, je suis parti 2 mois en Guadeloupe pour fuir la déprime et l’arrêt des concerts. Avec des amis nous sommes allés voir Jean-Marc en concert, nous connaissions ses morceaux festifs, mais ce soir-là il nous a fait découvrir un répertoire de musiques antillaises d’une richesse incroyable. Je me suis rendu compte que nous connaissons finalement très peu cette culture en métropole, je lui ai donc proposé de créer un projet musical dans le but de mélanger nos univers et nos savoirs faire pour faire connaitre et exporter sa musique.
Jean-Marc Ferdinand : Alors que j’étais en concert après un sacré bout de temps, dans un lieu exotique de la côte sous le vent chez moi en Guadeloupe, je fis la rencontre d’une bande joyeuse qui apparemment était là pour décompresser et se changer les idées au pays. Chose que je n’allais pas tarder à savoir, c’est qu’ils étaient venus ce soir-là uniquement parce qu’ils avaient entendu dire que j’y étais. Dites-vous bien à quel point j’étais flatté par cette démarche en l’apprenant, d’autant plus qu’au fil de la soirée, je me suis rendu compte qu’ils connaissaient bon nombre de mes titres phares. À l’issue du concert, nous avons partagé plus intimement autour d’un verre, et c’est là que je fis la connaissance de Cyprien, ainsi que toute son équipe de copains. Au fil de la conversation nous avons fait le constat qu’une collaboration musicale pourrait être possible, vu que nous avions chacun un univers musical qui ne demande qu’à se côtoyer plus étroitement.
Guadeloupe, métropole, les territoires nourrissent certainement le projet, quels sont les apports de chacun dans le processus de création ?
LDV : En arrivant en Guadeloupe pour la première fois, je n’avais pas d’autres attentes que de fuir mon quotidien. J’y ai découvert une culture à la fois fascinante et étonnamment méconnue, même pour les musiciens de métropoles. Même moi qui défend et m’inspire dans mon travail des musiques africaines et afro-américianes, je n’avais jamais entendu parlé du Gwo Ka, alors qu’ils se sont battu pour le faire reconnaitre par l’UNESCO en 2014.
Je suis parti 6 semaines vivre à Saint-Claude, au pied de la Soufrière, pour apprendre sur place à connaitre la musique antillaise. Il était très important pour moi de composer sur place, de sentir l’atmosphère et de découvrir la culture en immersion avec Jean-Marc, chez lui.
JMF : J’ai eu l’impression que ma rencontre avec Cyprien n’était pas fortuite, tant les choses se sont emboîtées facilement. En effet, sa soif de vouloir connaître plus profondément notre culture qu’il venait de découvrir, a selon moi accéléré les choses. De mon côté, je vivais ces échanges avec un tel enthousiasme et prenais énormément de plaisir à transmettre à mon nouvel acolyte mes connaissances en matière de culture guadeloupéenne. Le simple fait d’associer notre musique traditionnelle à un autre genre musical me procurait une joie intense car j’étais sûr que ça donnerait quelque chose de fabuleux, d’autant plus que j’avais bien remarqué que Cyprien maîtrisait parfaitement son sujet et qu’à nous deux on faisait la paire. Nul n’est besoin de vous dire que lorsque nous avons commencé à travailler ensemble lors de son troisième voyage, nous étions dans l’obligation de nous rendre à l’évidence, nous tenions là quelque chose qui valait le coup.
« Le simple fait d’associer notre musique traditionnelle à un autre genre musical me procurait une joie intense car j’étais sûr que ça donnerait quelque chose de fabuleux. »
Il s’agit donc de créer une musique qui inclue vos différents univers, comment cela se traduit concrètement ? À quoi s’attendre le 17 septembre à Django ?
LDV : Nous avons créé des morceaux qui prennent leurs racines dans le Gwo Ka traditionnel et tous ses descendants, que nous avons confronté à mes sonorités et ma manière de composer qui n’avait jamais été en contact avec cette musique. Le résultat sera un voyage à la fois exigeant, et à la fois imaginaire, à travers les multiples facettes de la musique antillaise. Il y aura du chant envoûtants, des rythmes ancestraux, des machines modernes, du groove et de la douceur…
JMF : La venue de Cyprien durant pratiquement un mois et demi nous a permis de travailler sans relâche sur des compositions ayant comme base le « gwoka traditionnel de Guadeloupe », sauf qu’avec les apports électro, nous sommes vraiment partis dans un univers où chacun peut y trouver son compte. Nous avons beaucoup travaillé, essayer plusieurs chose, plusieurs placements, et finalement trouver selon nous, une bonne alchimie. Nous avons fait en sorte de ratisser large avec des rythmes festifs, des rythmes beaucoup plus doux, des rythmes partant de la tradition, des rythmes exprimant la souffrance… Il faut dire que nous étions très prolifique durant cette période car les conditions de travail était excellente, et nous n’avions aucune contrainte. C’est une période que je n’oublierais jamais !
Quelles sont vos attentes sur cette création, des ambitions à plus long terme ?
LDV : Notre ambition est de donner accès à la musique antillaise au plus grand nombre en métropole, de montrer qu’il y a le zouk mais aussi bien plus que ça. De montrer que nos cultures sont très éloignées mais pourtant si proches. Notre ambition est vraiment de partager et d’apprendre les uns des autres. Nous souhaitons évidemment également proposer en Guadeloupe et aux Antilles une vision nouvelle et originale de ce patrimoine musical fabuleux.
JMF : Si cette création pouvait attiser la curiosité du plus grand nombre pour les pousser à mieux faire connaître cette musique traditionnelle de Guadeloupe, qui je le rappelle a été reconnu comme patrimoine immatériel à l’UNESCO en 2014, nous serions des hommes comblés. Aux Antilles il n’y a pas que le « Zouk » (qui a d’ailleurs été créé à partir d’un des rythmes du gwoka), il existe aussi cette musique traditionnelle qui était jouée par nos ancêtres et qui ne demande qu’à être connu aux quatre coins du globe. Cette création c’est aussi l’occasion de faire découvrir à mes compatriotes guadeloupéens une autre manière d’utiliser nos rythmes traditionnels sans pour autant les dénaturer. Nous sommes à l’air du métissage, alors pourquoi pas !
Et sinon, qu’est-ce qu’on mange ?
LDV : Tarte Flambée au Munster !
JMF : Une bonne purée de pommes de terre à la française, accompagnée de langues de bœuf en sauce, hum !